Introduction d’entités nouvelles dans la biosphère
Mis à jour le | Commissariat général au développement durable
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Enjeux globaux
Deux principaux facteurs ont conduit à considérer la pollution chimique comme une limite planétaire : d’une part, en raison de ses effets néfastes sur le développement physiologique de l’homme et sur le fonctionnement des écosystèmes ; d’autre part, car elle agit comme une variable lente qui affecte d’autres limites planétaires. En effet, la pollution chimique peut avoir des répercussions sur la limite « érosion de la biodiversité » en réduisant l’abondance des espèces et en augmentant potentiellement la vulnérabilité des organismes à d’autres menaces (changement climatique). Elle interagit également avec la limite « changement climatique » par les rejets de mercure dans l’environnement (via la combustion du charbon) et par les émissions de CO2 dues aux produits chimiques industriels (dérivés du pétrole).
Fixer un seuil pour la pollution chimique nécessite de connaître l’impact de l’exposition aux différentes substances sur les organismes et dans l’environnement. Compte tenu de la quantité importante de produits chimiques en circulation, définir une limite planétaire unique issue des effets combinés de ces produits n’a pas été possible. Deux approches complémentaires ont tout de même été proposées : l’une consistant à se concentrer sur les polluants persistants ayant des impacts à l’échelle globale, l’autre à identifier les effets néfastes, à long terme et à grande échelle, de la pollution chimique sur les organismes vivants.
Lors de la révision du modèle conceptuel (Steffen et al., 2015), le périmètre de la limite, rebaptisée « introduction d’entités nouvelles dans la biosphère », a été redéfini. Il s’applique désormais aux nouvelles substances chimiques, aux nouvelles formes de substances existantes et aux formes de vie modifiées susceptibles d’avoir des effets indésirables sur les écosystèmes, les organismes vivants et la santé. L’introduction anthropique de ces entités dans l’environnement est d’autant plus préoccupante à l’échelle mondiale qu’elles sont persistantes, se déplacent et s’étendent sur de grandes échelles géographiques.
À cette longue liste de substances chimiques, viennent s’ajouter les nanomatériaux et les polymères plastiques mobilisés par les activités humaines et qui ne sont pas sans risques pour la santé humaine et l’environnement. De plus, les émissions de CFC (chlorofluorocarbones), issues de ces nouvelles entités, ont des effets majeurs sur la couche d’ozone stratosphérique.
Malgré les avancées de la recherche, aucune analyse n’a permis à ce stade de déterminer un seuil critique caractérisant la limite dans son ensemble. Des actions de prévention sont menées notamment via la chimie verte. L’objectif est de mieux comprendre et de surveiller les processus vitaux de la planète pour détecter au plus vite les effets perturbateurs de ces nouvelles substances sur l’homme et l’environnement.
Situation de la France
La France, par ses activités, ses modes de production et de consommation, contribue aux rejets de polluants chimiques dans l’environnement. Compte tenu de la multiplicité des substances et des enjeux nationaux, trois types de polluants sont traités ici : les déchets plastiques en mer, les déchets nucléaires, les variétés tolérantes aux herbicides. D’autres sources de pollutions prises en compte dans cette limite (nanomatériaux, perturbateurs endocriniens, etc.) pour lesquelles la France a une part de responsabilité, sont développées dans d’autres parties du rapport.
Déchets plastiques : entre 5 et 13 millions de tonnes rejetées chaque année dans les océans
Le plastique, utilisé depuis les années 1950, représente un enjeu environnemental majeur, lié à la fois à la consommation de ressources nécessaires à sa fabrication et à la production de déchets qu’il engendre.
Entre 1950 et 2017, la production mondiale de matières plastiques n’a cessé d’augmenter, passant de 1,5 million de tonnes en 1950 à 350 millions de tonnes en 2017, soit respectivement 0,6 kg/habitant et 46 kg/habitant. En 2015, 15 % des déchets plastiques mondiaux sont collectés pour être recyclés, 25 % sont incinérés et 60 % sont mis en décharge. Selon PlasticsEurope, en France, en 2016, sur les 3,4 millions de tonnes collectés, 22 % des déchets plastiques et 26 % des déchets d’emballages plastiques sont recyclés.
Chaque année, entre 5 et 13 millions de tonnes de déchets plastiques sont rejetés en mer. 80 % proviennent de la terre et 20 % des activités maritimes. Les sources des déchets terrestres sont multiples : déchets urbains, tourisme, décharges illégales, produits cosmétiques, fibres de polyester et acryliques. La moitié des déchets retrouvés sur les plages européennes sont des plastiques à usage unique : bouteilles, capsules, couvercles, mégots de cigarette, bâtonnets de coton-tige, sachets de chips, papiers de bonbons, objets sanitaires, sacs en plastique, couverts, pailles, etc.
Les déchets plastiques sont déversés dans les océans le plus souvent par les égouts ou les rivières. Ils peuvent également être liés à des phénomènes naturels (tempête, tsunami, crue, etc.). Ils arrivent sous forme de macroplastiques ou de microplastiques. Les microplastiques sont des minuscules particules de plastique ayant une taille inférieure à 5 millimètres. Il en existe deux catégories : les microplastiques primaires et les microplastiques secondaires.
Selon l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), les microplastiques primaires proviennent de la dégradation des textiles (35 %), de la dégradation des pneus (28 %), des poussières urbaines (24 %), ou ont été ajoutés intentionnellement aux produits (agents de lavage dans des détergents, microbilles exfoliantes dans des cosmétiques, etc.).
Les microplastiques secondaires sont le résultat de macroplastiques qui se répandent en mer (via le tourisme, la pêche, l’industrie de démantèlement des navires, etc.) et se dégradent lentement en petits fragments sous l’effet des courants marins et des UV notamment.
La pollution marine par les déchets plastiques a de multiples conséquences sur l’environnement, l’économie et la santé. Une « soupe de plastique » se forme dans les océans, provoquant notamment l’étranglement des mammifères marins et des oiseaux dans les filets, mais également l’altération de l’équilibre des écosystèmes du fait du transport d’espèces invasives sur de longues distances, etc.
Les microplastiques, ingérés par de nombreux organismes marins (cétacés, mollusques, plancton ou poissons), se retrouvent dans la chaîne alimentaire. De plus, le plastique contient des additifs chimiques qui peuvent être des perturbateurs endocriniens. Selon l’UICN, au niveau mondial, en moyenne 700 espèces marines sont touchées, dont 17 % menacées ou en danger critique d’extinction.
Sur le plan économique, le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) estime à 13 milliards de dollars le coût annuel, en capital naturel, des déchets plastiques présents dans les océans. Le coût pour l’Europe représente 470 millions d’euros, selon la Commission européenne.
Face à ces enjeux environnementaux, économiques et sanitaires planétaires, le PNUE, chargé d’évaluer l’efficacité des approches internationales en matière de lutte contre les déchets plastiques en mer, souligne l’absence d’institution dédiée à l’échelle mondiale. Seule existe la convention internationale MARPOL (MARine POLlution) pour la prévention de la pollution par les navires, qui depuis 1988, interdit le rejet à la mer de matières plastiques.
En France, plusieurs mesures visant à réduire ou supprimer l’utilisation du plastique sont en place : le plan Biodiversité (2018), la loi pour la reconquête de la biodiversité (2016), la loi de transition énergétique pour la croissance verte (2015), etc.
La création d’une filière REP visant à gérer les mégots de cigarettes sera à l’étude dans le cadre du projet de loi Déchets en 2019. Enfin, dans la feuille de route pour l’économie circulaire, la France se donne pour objectif de recycler 100 % des déchets plastiques en 2025.
Déchets nucléaires : la France contribue à hauteur de 19 % aux déchets nucléaires mondiaux
Autre enjeu environnemental national, 77 % de l’électricité en France est produite à partir de centrales nucléaires. La France possède 13 % des réacteurs nucléaires mondiaux en fonctionnement et produit 18 % de l’électricité d’origine nucléaire.
En 2013, un peu moins de 1,5 million de m3 de déchets radioactifs sont présents sur le territoire, ce qui représente un cinquième des déchets nucléaires mondiaux (soit 19 %). Ce volume a augmenté de 58 % entre 2002 et 2016.
Il existe principalement cinq catégories de déchets classés selon leur filière de stockage qui dépend de deux critères, leur niveau de radioactivité et leur durée de vie.
Alors que les déchets de très faible activité et les déchets de faible et moyenne activité à vie courte sont stockés pendant la durée nécessaire à leur décroissance radioactive, les déchets de haute activité, de moyenne activité à vie longue et de faible activité à vie longue, sont entreposés dans l’attente de centres de stockage adaptés.
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