Ressources naturelles : podcast

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Publié le | Commissariat général au développement durable

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Un podcast pour approfondir la question de l’épuisement des ressources naturelles à travers l’exemple de l’eau.

L’eau est la ressource la plus exploitée au monde... Un Français utilise en moyenne 150 litres d’eau potable par jour. Cette eau peut être prélevée dans une rivière, un fleuve, une nappe souterraine, … Mais elle ne représente que 15 à 20 % des prélèvements.
À quoi servent les 80 % restants ? Quelle est la différence entre l’eau prélevée et l’eau consommée ? Quel secteur d’activité pèse le plus dans cette consommation ?
La ressource en eau disponible est-elle en hausse ou en baisse ?
Face aux sécheresses à répétition, qui seront les plus touchés par les restrictions d’eau ?

Toutes les réponses sont dans ce podcast de 10 minutes.

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Armel Hemme (AH) : Vous avez peut-être dû faire face, l’été dernier, ou celui d’avant, en 2023, ou celui d’avant, en 2022, à des mesures de restriction d’eau... En période de sécheresse, lorsqu’une pénurie d’eau s’annonce, les préfets peuvent prendre des mesures (graduelles et temporaires) de restriction.

Je vous l’accorde, en ce moment la sécheresse paraît loin ! En ce tout début d’année 2025, la France a plutôt les pieds dans l’eau... L’état de catastrophe naturelle a d’ailleurs été reconnu dans 3 départements touchés par des inondations.

Et pourtant. Ces dernières années, la France a connu plusieurs sécheresses – même si tous les départements ne sont pas concernés au même niveau.

Vous l’avez compris, dans ce podcast nous allons parler de l’eau, une ressource qu’on imagine abondante en France (il y en a plein le robinet !), mais qui, ces dernières années, vient parfois à manquer.

Bonjour, je m’appelle Armel Hemme .

Vous écoutez Notre environnement monte le son , le premier épisode d’une série spéciale enregistrée à l’occasion de la sortie du rapport 2024 sur l’État de l’environnement en France .

***

L’État de l’environnement en France , c’est un rapport publié tous les 4 ans, depuis 30 ans. Il est produit par le Commissariat Général au Développement Durable.

La première édition, en 1994, suivait de peu le Sommet de la Terre de Rio de Janeiro, un moment majeur dans la prise en compte des questions liées à l’environnement au niveau mondial.

Ce rapport périodique s’adresse à tout le monde, dans un souci de partage de la connaissance, de partage de l’information environnementale, pour nous guider dans nos prises de décisions individuelles et collectives...

Il nous alerte sur quatre défis environnementaux interdépendants, qui interagissent entre eux : l’épuisement des ressources naturelles, la pollution des milieux naturels, le changement climatique, et le déclin de la biodiversité.

Dans cette série de podcasts, nous passons la parole à celles et ceux qui ont participé à l’élaboration de ce rapport...

Valérie Dossa-Thauvin, bonjour !

Vous travaillez au Commissariat Général au Développement Durable, qui dépend du ministère de la transition écologique... Vous êtes chargée de mission ressources en eau.

L’eau est la ressource la plus exploitée au monde... Un Français utilise en moyenne 150 litres d’eau potable par jour, de l’eau qui peut être prélevée dans une rivière, un fleuve, une nappe souterraine, etc.

150 litres par personne ça fait déjà un beau volume... Mais l’eau potable ne représente que 15 à 20 % des prélèvements. À quoi servent les 80 % restants ?

Valérie Dossa-Thauvin (VDT) : Ce qu’il faut retenir, c’est que la moitié de l’eau prélevée sert à refroidir les centrales électriques.
Tandis qu’agriculture et industrie ont besoin chacune de moins de 10 % du volume total.
On a aussi les canaux de navigation qui comptent autant que l’eau potable, à savoir 15 à 20 % des prélèvements totaux.

AT : Mais attention, il y a deux types d’indicateurs pour quantifier notre utilisation de l’eau... Car dans le domaine des statistiques, on aime bien être précis !

  • L’eau « prélevée » : c’est toute l’eau douce que l’on prend du milieu naturel et que l’on utilise. Une patie retourne aux milieux aquatiques (exemple : on prend l’eau de la rivière, on l’utilise dans une usine, et une partie est rendue à la rivière)...
  • Et l’eau « consommée » : c’est l’eau qu’on prélève, qu’on utilise, et qui n’est donc pas restituée aux milieux aquatiques (exemple : on prend l’eau de la rivière, on arrose des champs avec).

Pourquoi c’est important de faire la différence ?

VDT : Là, il faut parler de bassin versant. Le bassin versant, c’est le territoire qui recueille toutes les eaux qui convergent vers un même point, par exemple vers une confluence. Et consommer de l’eau revient à prendre de l’eau qui ne se retrouvera pas plus bas sur le bassin-versant, donc en aval.
On voit donc que la connaissance et la maîtrise des consommations en eau sont essentielles pour évaluer la disponibilité de la ressource en eau pour tous les usages qui sont situés en aval : humains (y compris navigation, pêche, loisirs....) et milieux aquatiques.

AT : L’eau consommée, c’est quelle part des prélèvements ?

VDT : L’eau consommée, c’est 12 à 15 % des prélèvements.
Ce qui fait qu’en France métropolitaine chaque année environ 4 milliards de m3 d’eau douce est consommée.

AT : Quel secteur d’activité pèse le plus dans cette consommation ?

VDT : C’est l’usage agricole qui pèse le plus, avec près de 60 % du total d’eau consommée annuellement, et 85 % en été.
La hiérarchie des secteurs d’activité est différente de celle des prélèvements, puisque le refroidissement des centrales n’arrive qu’en troisième position, derrière l’eau potable qui prend un quart de l’eau consommée. Pour les usages industriels, c’est 4 %.
Mais cette répartition est très différente selon les régions et les saisons.

AT : Voilà pour le panorama.

En France le climat se réchauffe plus rapidement qu’ailleurs : on a désormais l’habitude des canicules, des épisodes de sécheresse, mais aussi des épisodes de pluies intenses et d’inondations... Alors : y a t-il plus ou moins d’eau qu’avant ?

Y a t-il une hausse, une baisse de la ressource disponible ? Que disent les statistiques ?

VDT : Les statistiques disent que sur le territoire métropolitain, la ressource en eau disponible a diminué de 14 % par rapport à la période 1990-2001 :

  • D’une part parce qu’il y a moins de pluie.
  • D’autre part parce qu’il y a plus d’eau qui repart dans l’atmosphère par évaporation et par la respiration des végétaux. On parle d’augmentation de l’évapotranspiration.

AT : Le constat n’est pas le même dans toutes les régions, en métropole... L’Occitanie est plus touchée par la sécheresse que les Hauts de France !

VDT : Oui ! Lorsqu’on observe le phénomène plus finement, c’est effectivement dans la moitié sud de la France que la ressource en eau a diminué.
C’est le cas en particulier dans le bassin de la Garonne et dans le bassin du Rhône.
Et avec l’accélération de la fonte des glaciers, on peut craindre une diminution encore plus forte dans les années qui viennent...

AT : J’évoquais les restrictions d’eau en introduction. On a presque l’impression que c’est devenu tristement banal, ces dernières années dans certaines régions...

VDT : Oui efectivement. Depuis 2017, presque tous les ans, on a au moins 30 % du territoire métropolitain qui est touché.
Et dans l’Ouest et le Sud-Oues,t on observe fréquemment des restrictions de crise qui durent au moins 2 mois. Or ces mesures entraînent des interdictions des usages de l’eau et notamment des interdictions d’irrigation.
Donc on voit déjà que l’eau n’est pas disponible en permanence et pour tous les usages sur une partie du pays.

AT : Et les alertes peuvent sonner bien avant l’été ! En 2024 dans le Var, la préfecture avait appelé les varois à être économes dès le mois... de février ! Parmi les recommandations : utiliser la « stricte quantité d’eau nécessaire »...

Deux ans plus tôt, en 2022, c’était une sécheresse spectaculaire... Avec là encore, beaucoup de restrictions ?

VDT : Oh oui ! C’était une année exceptionnelle : des restrictions d’utilisation des eaux de surface s’appliquaient sur 97 % du territoire métropolitain, et 55 % était couvert par des mesures de crise.
Et l’utilisation des eaux souterraines était aussi restreinte sur 27 % du territoire.

AT : Le rapport État de l’environnement en France compare les années récentes à la période 1990-2001, pourquoi ?

VDT : Ces périodes ont été identifiées par un test statistique, qui montre un changement entre les deux périodes, avec une ressource en eau en moyenne moins abondante depuis 2002.

AT : Les centrales nucléaires ont besoin d’eau pour fonctionner, un besoin important pour leur refroidissement... C’est pour cette raison qu’elles sont construites près de fleuves ou de rivières.

Que se passe-t-il quand les débits deviennent faibles, dans les cours d’eau ?

VDT : Dans ce cas, on peut prélever moins d’eau pour le refroidissement.
En plus, il est difficile, voire impossible de rejeter l’eau réchauffée, car on ne peut pas trop augmenter la température des cours d’eau.
Le risque est alors une baisse des capacités de production d’électricité en période de basses eaux.
Et s’il y a moins d’eau, les rejets seront moins dilués, ce qui peut entraîner une plus grande pollution des eaux dont les poissons peuvent faire les frais. Ça pose aussi un problème s’il y a par exemple un prélèvement pour l’eau potable à l’aval.

AT : À l’aval, c’est-à-dire plus loin sur le cours d’eau ?

VDT : Oui, c’est bien ça. Augmentation de la température et concentration de la pollution posent des problèmes de qualité de l’eau, et on devra faire plus de traitements pour rendre consommable l’eau prélevée à l’aval.

AT : Face à ces phénomènes, va-t-il falloir réduire les prélèvements dans les cours d’eau ?

VDT : Oui, et des actions existent déjà pour ajuster les prélèvements en eau à la ressource réellement disponible.
Ainsi, le plan eau 2023 prévoit ainsi une baisse de 10 % de tous les prélèvements annuels autres qu’agricoles.
Et avant cela, les agences de l’eau ont établi des Plans d’adaptation au changement climatique pour anticiper la baisse prévisible de la ressource en eau et inciter tous les acteurs, y compris vous et moi, à agir.
Les efforts pour une gestion économe et partagée de l’eau doivent se poursuivre !

***

AT : Nous avons pris le temps de parler de l’eau...

Mais au chapitre des ressources naturelles, nous aurions pu aussi parler du pétrole, du gaz ou du charbon, qui représentent encore à eux trois plus de 60 % de la consommation d’énergie finale en France. Des énergies fossiles très émettrices de gaz à effet de serre... Et qu’il faut importer.
(L’énergie finale, c’est l’énergie qu’on consomme chez nous sous sa forme finale, électricité, gaz, essence etc.)

Lors de la Cop28 sur le climat, en 2023, les pays participants se sont accordés sur la nécessité d’une transition vers un monde sans énergies fossiles... Vous voyez qu’il y a encore du chemin !

Pour produire de l’électricité, aujourd’hui la France peut compter sur son vaste parc nucléaire : mais là encore, notre pays est très dépendant des importations d’uranium, et ses centrales sont vieillissantes...
Construire de nouveaux réacteurs ? Ça prendra du temps ! A court et moyen terme, les énergies renouvelables doivent jouer un rôle central dans la baisse de l’utilisation des énergies fossiles.

Quant aux ressources minérales métalliques, qui permettent de fabriquer des batteries de voitures ou de vélo par exemple... Nous les trouvons aussi hors de nos frontières. 99,7 % des ressources minérales métalliques utilisées en France sont importées.

Pour préparer l’avenir, le rapport 2024 sur État de l’environnement en France rappelle quelques leviers...
Dans le domaine des batteries, cela passe par la sobriété, en réduisant la taille des véhicules (et donc, des batteries associées) ; la diversification des chimies des batteries ; ou le recyclage, pour alimenter les besoins à long terme.

Je vous invite à lire ce rapport pour en savoir plus !

Valérie Dossa-Thauvin, chargée de mission ressources en eau au Commissariat Général au Développement Durable, merci d’être venue à ce micro !

***

Vous écoutiez Notre environnement monte le son...

Dans le prochain épisode, nous parlerons d’une menace sérieuse pour l’environnement et la santé : la pollution des milieux naturels, et l’impact des pesticides.

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