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Journée du Podcast 2025 : 4 épisodes sur les défis actuels pour l’environnement

Mis à jour le | Commissariat général au développement durable

À l’occasion de la Journée du Podcast, le 30 septembre 2025, plongez dans le domaine de l’environnement, en 4 épisodes de 10 minutes.

Ressource en eau, utilisation des pesticides, empreinte carbone et biodiversité en Outre-mer : des podcasts simples pour une vision claire sur les défis à relever, qui sont tous étroitement liés.

Le Rapport sur l’état de l’environnement en France 2024 , publié tous les 4 ans par le Commissariat général au développement durable, fournit des informations objectives, fiables et scientifiquement fondées.

Les quatre podcasts réalisés pour ce rapport permettent d’explorer davantage certains problèmes : comment l’eau douce est utilisée et pourquoi elle vient parfois à manquer, quel est l’impact des pesticides sur notre environnement, quelles sont les émissions de gaz à effet de serre liées à la consommation quotidienne, et quelles menaces pèsent sur la biodiversité en Outre-mer.

1. L’eau, une ressource qui ne coule plus de source : En moyenne, chaque Français utilise 150 litres d’eau potable par jour, mais cela ne représente qu’une petite partie de l’eau douce prélevée chaque année : refroidissement des centrales, irrigation, consommation des ménages : découvrez comment l’eau est utilisée et pourquoi elle vient parfois à manquer.

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Armel Hemme (AH) : Vous avez peut-être dû faire face, l’été dernier, ou celui d’avant, en 2023, ou celui d’avant, en 2022, à des mesures de restriction d’eau... En période de sécheresse, lorsqu’une pénurie d’eau s’annonce, les préfets peuvent prendre des mesures (graduelles et temporaires) de restriction.

Je vous l’accorde, en ce moment la sécheresse paraît loin ! En ce tout début d’année 2025, la France a plutôt les pieds dans l’eau... L’état de catastrophe naturelle a d’ailleurs été reconnu dans 3 départements touchés par des inondations.

Et pourtant. Ces dernières années, la France a connu plusieurs sécheresses – même si tous les départements ne sont pas concernés au même niveau.

Vous l’avez compris, dans ce podcast nous allons parler de l’eau, une ressource qu’on imagine abondante en France (il y en a plein le robinet !), mais qui, ces dernières années, vient parfois à manquer.

Bonjour, je m’appelle Armel Hemme .

Vous écoutez Notre environnement monte le son , le premier épisode d’une série spéciale enregistrée à l’occasion de la sortie du rapport 2024 sur l’État de l’environnement en France .

***

L’État de l’environnement en France , c’est un rapport publié tous les 4 ans, depuis 30 ans. Il est produit par le Commissariat Général au Développement Durable.

La première édition, en 1994, suivait de peu le Sommet de la Terre de Rio de Janeiro, un moment majeur dans la prise en compte des questions liées à l’environnement au niveau mondial.

Ce rapport périodique s’adresse à tout le monde, dans un souci de partage de la connaissance, de partage de l’information environnementale, pour nous guider dans nos prises de décisions individuelles et collectives...

Il nous alerte sur quatre défis environnementaux interdépendants, qui interagissent entre eux : l’épuisement des ressources naturelles, la pollution des milieux naturels, le changement climatique, et le déclin de la biodiversité.

Dans cette série de podcasts, nous passons la parole à celles et ceux qui ont participé à l’élaboration de ce rapport...

Valérie Dossa-Thauvin, bonjour !

Vous travaillez au Commissariat Général au Développement Durable, qui dépend du ministère de la transition écologique... Vous êtes chargée de mission ressources en eau.

L’eau est la ressource la plus exploitée au monde... Un Français utilise en moyenne 150 litres d’eau potable par jour, de l’eau qui peut être prélevée dans une rivière, un fleuve, une nappe souterraine, etc.

150 litres par personne ça fait déjà un beau volume... Mais l’eau potable ne représente que 15 à 20 % des prélèvements. À quoi servent les 80 % restants ?

Valérie Dossa-Thauvin (VDT) : Ce qu’il faut retenir, c’est que la moitié de l’eau prélevée sert à refroidir les centrales électriques.
Tandis qu’agriculture et industrie ont besoin chacune de moins de 10 % du volume total.
On a aussi les canaux de navigation qui comptent autant que l’eau potable, à savoir 15 à 20 % des prélèvements totaux.

AT : Mais attention, il y a deux types d’indicateurs pour quantifier notre utilisation de l’eau... Car dans le domaine des statistiques, on aime bien être précis !

  • L’eau « prélevée » : c’est toute l’eau douce que l’on prend du milieu naturel et que l’on utilise. Une patie retourne aux milieux aquatiques (exemple : on prend l’eau de la rivière, on l’utilise dans une usine, et une partie est rendue à la rivière)...
  • Et l’eau « consommée » : c’est l’eau qu’on prélève, qu’on utilise, et qui n’est donc pas restituée aux milieux aquatiques (exemple : on prend l’eau de la rivière, on arrose des champs avec).

Pourquoi c’est important de faire la différence ?

VDT : Là, il faut parler de bassin versant. Le bassin versant, c’est le territoire qui recueille toutes les eaux qui convergent vers un même point, par exemple vers une confluence. Et consommer de l’eau revient à prendre de l’eau qui ne se retrouvera pas plus bas sur le bassin-versant, donc en aval.
On voit donc que la connaissance et la maîtrise des consommations en eau sont essentielles pour évaluer la disponibilité de la ressource en eau pour tous les usages qui sont situés en aval : humains (y compris navigation, pêche, loisirs....) et milieux aquatiques.

AT : L’eau consommée, c’est quelle part des prélèvements ?

VDT : L’eau consommée, c’est 12 à 15 % des prélèvements.
Ce qui fait qu’en France métropolitaine chaque année environ 4 milliards de m3 d’eau douce est consommée.

AT : Quel secteur d’activité pèse le plus dans cette consommation ?

VDT : C’est l’usage agricole qui pèse le plus, avec près de 60 % du total d’eau consommée annuellement, et 85 % en été.
La hiérarchie des secteurs d’activité est différente de celle des prélèvements, puisque le refroidissement des centrales n’arrive qu’en troisième position, derrière l’eau potable qui prend un quart de l’eau consommée. Pour les usages industriels, c’est 4 %.
Mais cette répartition est très différente selon les régions et les saisons.

AT : Voilà pour le panorama.

En France le climat se réchauffe plus rapidement qu’ailleurs : on a désormais l’habitude des canicules, des épisodes de sécheresse, mais aussi des épisodes de pluies intenses et d’inondations... Alors : y a t-il plus ou moins d’eau qu’avant ?

Y a t-il une hausse, une baisse de la ressource disponible ? Que disent les statistiques ?

VDT : Les statistiques disent que sur le territoire métropolitain, la ressource en eau disponible a diminué de 14 % par rapport à la période 1990-2001 :

  • D’une part parce qu’il y a moins de pluie.
  • D’autre part parce qu’il y a plus d’eau qui repart dans l’atmosphère par évaporation et par la respiration des végétaux. On parle d’augmentation de l’évapotranspiration.

AT : Le constat n’est pas le même dans toutes les régions, en métropole... L’Occitanie est plus touchée par la sécheresse que les Hauts de France !

VDT : Oui ! Lorsqu’on observe le phénomène plus finement, c’est effectivement dans la moitié sud de la France que la ressource en eau a diminué.
C’est le cas en particulier dans le bassin de la Garonne et dans le bassin du Rhône.
Et avec l’accélération de la fonte des glaciers, on peut craindre une diminution encore plus forte dans les années qui viennent...

AT : J’évoquais les restrictions d’eau en introduction. On a presque l’impression que c’est devenu tristement banal, ces dernières années dans certaines régions...

VDT : Oui efectivement. Depuis 2017, presque tous les ans, on a au moins 30 % du territoire métropolitain qui est touché.
Et dans l’Ouest et le Sud-Oues,t on observe fréquemment des restrictions de crise qui durent au moins 2 mois. Or ces mesures entraînent des interdictions des usages de l’eau et notamment des interdictions d’irrigation.
Donc on voit déjà que l’eau n’est pas disponible en permanence et pour tous les usages sur une partie du pays.

AT : Et les alertes peuvent sonner bien avant l’été ! En 2024 dans le Var, la préfecture avait appelé les varois à être économes dès le mois... de février ! Parmi les recommandations : utiliser la « stricte quantité d’eau nécessaire »...

Deux ans plus tôt, en 2022, c’était une sécheresse spectaculaire... Avec là encore, beaucoup de restrictions ?

VDT : Oh oui ! C’était une année exceptionnelle : des restrictions d’utilisation des eaux de surface s’appliquaient sur 97 % du territoire métropolitain, et 55 % était couvert par des mesures de crise.
Et l’utilisation des eaux souterraines était aussi restreinte sur 27 % du territoire.

AT : Le rapport État de l’environnement en France compare les années récentes à la période 1990-2001, pourquoi ?

VDT : Ces périodes ont été identifiées par un test statistique, qui montre un changement entre les deux périodes, avec une ressource en eau en moyenne moins abondante depuis 2002.

AT : Les centrales nucléaires ont besoin d’eau pour fonctionner, un besoin important pour leur refroidissement... C’est pour cette raison qu’elles sont construites près de fleuves ou de rivières.

Que se passe-t-il quand les débits deviennent faibles, dans les cours d’eau ?

VDT : Dans ce cas, on peut prélever moins d’eau pour le refroidissement.
En plus, il est difficile, voire impossible de rejeter l’eau réchauffée, car on ne peut pas trop augmenter la température des cours d’eau.
Le risque est alors une baisse des capacités de production d’électricité en période de basses eaux.
Et s’il y a moins d’eau, les rejets seront moins dilués, ce qui peut entraîner une plus grande pollution des eaux dont les poissons peuvent faire les frais. Ça pose aussi un problème s’il y a par exemple un prélèvement pour l’eau potable à l’aval.

AT : À l’aval, c’est-à-dire plus loin sur le cours d’eau ?

VDT : Oui, c’est bien ça. Augmentation de la température et concentration de la pollution posent des problèmes de qualité de l’eau, et on devra faire plus de traitements pour rendre consommable l’eau prélevée à l’aval.

AT : Face à ces phénomènes, va-t-il falloir réduire les prélèvements dans les cours d’eau ?

VDT : Oui, et des actions existent déjà pour ajuster les prélèvements en eau à la ressource réellement disponible.
Ainsi, le plan eau 2023 prévoit ainsi une baisse de 10 % de tous les prélèvements annuels autres qu’agricoles.
Et avant cela, les agences de l’eau ont établi des Plans d’adaptation au changement climatique pour anticiper la baisse prévisible de la ressource en eau et inciter tous les acteurs, y compris vous et moi, à agir.
Les efforts pour une gestion économe et partagée de l’eau doivent se poursuivre !

***

AT : Nous avons pris le temps de parler de l’eau...

Mais au chapitre des ressources naturelles, nous aurions pu aussi parler du pétrole, du gaz ou du charbon, qui représentent encore à eux trois plus de 60 % de la consommation d’énergie finale en France. Des énergies fossiles très émettrices de gaz à effet de serre... Et qu’il faut importer.
(L’énergie finale, c’est l’énergie qu’on consomme chez nous sous sa forme finale, électricité, gaz, essence etc.)

Lors de la Cop28 sur le climat, en 2023, les pays participants se sont accordés sur la nécessité d’une transition vers un monde sans énergies fossiles... Vous voyez qu’il y a encore du chemin !

Pour produire de l’électricité, aujourd’hui la France peut compter sur son vaste parc nucléaire : mais là encore, notre pays est très dépendant des importations d’uranium, et ses centrales sont vieillissantes...
Construire de nouveaux réacteurs ? Ça prendra du temps ! A court et moyen terme, les énergies renouvelables doivent jouer un rôle central dans la baisse de l’utilisation des énergies fossiles.

Quant aux ressources minérales métalliques, qui permettent de fabriquer des batteries de voitures ou de vélo par exemple... Nous les trouvons aussi hors de nos frontières. 99,7 % des ressources minérales métalliques utilisées en France sont importées.

Pour préparer l’avenir, le rapport 2024 sur État de l’environnement en France rappelle quelques leviers...
Dans le domaine des batteries, cela passe par la sobriété, en réduisant la taille des véhicules (et donc, des batteries associées) ; la diversification des chimies des batteries ; ou le recyclage, pour alimenter les besoins à long terme.

Je vous invite à lire ce rapport pour en savoir plus !

Valérie Dossa-Thauvin, chargée de mission ressources en eau au Commissariat Général au Développement Durable, merci d’être venue à ce micro !

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Vous écoutiez Notre environnement monte le son...

Dans le prochain épisode, nous parlerons d’une menace sérieuse pour l’environnement et la santé : la pollution des milieux naturels, et l’impact des pesticides.

2. Pesticides, décryptage d’une pollution invisible : Les pesticides sont présents partout dans notre environnement : entre 2019 et 2021, trois quarts des sites de prélèvement d’eaux souterraines en France métropolitaine ont révélé la présence de pesticides. Ce podcast vous éclaire sur leurs conséquences sur le sol, l’eau et l’air, et met en lumière les réalités variées selon les régions.

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Armel Hemme (AH) : Flufénacet. Cela pourrait être le nom d’un personnage imaginaire, d’un personnage de conte, d’un farfadet...

C’est en fait le nom d’un pesticide, un herbicide utilisé principalement pour traiter des cultures de céréales (blé et orge en particulier). C’est l’un des plus vendus en France... Ses ventes ont quasiment doublé entre 2019 et 2022.

Le 27 septembre dernier, le flufénacet a été reconnu comme un perturbateur endocrinien par l’Autorité européenne de sécurité des aliments. Autrement dit : une substance qui perturbe les fonctions du corps, et a des conséquences néfastes sur l’organisme.

Pour y être exposé, pas besoin des flâner dans les champs de blé : la dégradation de ce pesticide produit de l’acide trifluoroacétique (dit aussi TFA), un polluant éternel qu’on retrouve dans l’eau potable... Parfois à des seuils très supérieurs au seuil de qualité.

Vous l’avez compris, dans ce podcast nous allons parler de la pollution des milieux naturels... Et plus précisément des conséquences de l’usage des pesticides.

Bonjour, je m’appelle Armel Hemme

Vous écoutez Notre environnement monte le son , le premier épisode d’une série spéciale enregistrée à l’occasion de la sortie du rapport sur l’ État de l’environnement en France .

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L’État de l’environnement en France , c’est un rapport publié tous les 4 ans, depuis 30 ans. Il est produit par le Commissariat Général au Développement Durable.

Ce rapport s’adresse à tout le monde, dans un souci de partage de la connaissance, de partage de l’information environnementale, pour nous guider dans nos prises de décisions individuelles et collectives...

Il nous alerte sur quatre défis environnementaux interdépendants, qui interagissent entre eux : l’épuisement des ressources naturelles, la pollution des milieux naturels, le changement climatique, et le déclin de la biodiversité.

Je vous invite à le lire...
Ou, au moins, à écouter cette série de podcasts !

Sandrine Parisse, bonjour...

Sandrine Parisse (SP) : Bonjour Armel !

AH : Vous travaillez au Commissariat Général du Développement Durable, qui dépend du ministère de la transition écologique... Vous êtes chargée de mission agriculture et environnement.

Sandrine, le rapport sur l’ État de l’environnement nous renseigne précisément sur l’usage des produits phytosanitaires en France. Les produits phytosanitaires, pour faire simple, ce sont des produits pesticides qui protègent les récoltes en luttant contre les agresseurs des cultures, et permettent de meilleurs rendements. Mais... qui peuvent aussi être très toxiques pour les humains et les animaux.

Face à ces risques, trois plans de réduction de l’usage des produits de traitement des cultures se sont succédé ces dernières années en France, tous visant une baisse de 50 %, d’abord pour 2018, puis pour 2025 et enfin pour 2030.

AH : Question simple : est-ce qu’on utilise moins de pesticides aujourd’hui qu’hier ?

SP : Globalement, non.
Le bilan des politiques qui vise à réduire les pesticides de 50 % est mitigé.
Depuis 2009, la quantité de produits phytosanitaires vendues est globalement stable.
En 2022, plus de 68 000 tonnes de substances actives ont été vendues pour protéger les cultures des insectes, des maladies et de la végétation indésirable.

Mais, si on y regarde de plus près, il y a des signaux positifs :

  • Premièrement, on observe une baisse des substances les plus toxiques pour la santé humaine. Il s’agit des substances qui peuvent avoir des effets cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction appelées « CMR ». Elles sont progressivement interdites.
  • Deuxièmement, on voit une augmentation des produits utilisables en biocontrôle ou en agriculture biologique.

AH : Les substances les plus toxiques, les CMR (cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques), sont donc moins utilisées... Quelle est l’ampleur de la baisse ?

SP : Les ventes de ces substances les plus toxiques ont effectivement baissé de 43 % en volume entre 2010 et 2022.

Leur proportion dans le total des ventes est passée de 30 % en 2010 à 15 % en 2022.

AH : Une carte m’a interpellé dans le rapport : la carte des achats de substances actives classées les plus toxiques par département... Où trouve-t-on les plus gros « consommateurs » ?

SP : En France métropolitaine, plus de la moitié des achats les plus toxiques en 2022 proviennent de 18 départements, avec en tête :

  • l’Eure-et-Loir,
  • la Somme,
  • la Marne,
  • la Charente-Maritime
  • et l’Eure.

Cela peut s’expliquer par le fait que ce sont des départements qui ont une grande surface agricole, notamment en grandes cultures.

En résumé : malgré des avancées sur les produits les plus toxiques, la France ne parvient pas à réduire fortement sa dépendance aux produits phytosanitaires et de vastes territoires sont exposés aux contaminations. D’autant que ces produits ne restent pas seulement à l’endroit où on les a utilisés.

AH : Quand on parle de contamination, ... C’est le sol, l’eau, l’air ?

SP : Les 3.

Les pesticides sont dispersés dans l’air pendant ou après les traitements des cultures :

  • soit par dérive au moment des pulvérisations
  • soit par évaporation à partir des sols et plantes traitées
  • soit par érosion des sols traités.

Certains pesticides comme le prosulfocarbe sont plus volatils que d’autres.
Une fois dans l’air, les pesticides sont transportés plus ou moins loin par le vent.

Dans les sols, sur 111 pesticides analysés, les plus fréquemment détectés sont :

  • le glyphosate, herbicide le plus vendu sur les 10 dernières années
  • et le fluopyram, un fongicide bien moins utilisé que le glyphosate.
    En effet, le caractère polluant d’un pesticide dépend de sa toxicité, de sa persistance mais aussi de la capacité des sols à le retenir ou à le dégrader.
    Les analyses confirment que si les terres cultivées sont les plus contaminées, les forêts et les prairies non traitées ne sont pas épargnées.

AH : Parfois, les sols accumulent de fortes teneurs en pesticides - avec des risques accrus pour la flore et pour la minuscule faune qui y vit (on parle de microfaune)...

SP : Oui, c’est vrai.

C’est notamment le cas du cuivre utilisé comme fongicide que l’on connait mieux sous le nom de « bouillie bordelaise ». De nombreuses années d’utilisation, ajoutées aux quantités naturellement présentes dans les sols, ont des effets néfastes sur la biodiversité.

Pour limiter cet effet d’accumulation, la réglementation européenne a introduit un seuil de quantité totale. Cette quantité est utilisable sur 7 années entre 2019 et 2025. Elle est de 28 kg de cuivre par hectare.

Pour limiter cet effet d’accumulation, la réglementation européenne a introduit un seuil de de 28 kg de cuivre par hectare. Cette quantité est utilisable sur 7 années entre 2019 et 2025.

AH : Et dans les cours d’eau, qu’est-ce qu’on observe ?

SP : Dans les cours d’eau et les plans d’eau, les pesticides contaminent la quasi-totalité des sites surveillés.
Les principales substances trouvées sont :
* en France métropolitaine : des herbicides et leurs produits de dégradation qu’on appelle métabolites,
* en outre-mer : on retrouve plutôt des insecticides et leurs métabolites.

On observe les situations les plus dégradées dans la moitié nord de la métropole et en Martinique.

AH : Dans les cours d’eau et plans d’eau, les pesticides contaminent la quasi-totalité des sites surveillés... Et dans les eaux souterraines ?

SP : Les eaux souterraines ne sont pas épargnées, elles non plus. Entre 2019 et 2021, en France métropolitaine, trois quarts des pesticides surveillés sont trouvés au moins une fois lors des prélèvements de surveillance. Et, en outre-mer, ils sont un quart.
Dans les eaux souterraines, ces polluants disparaissent très lentement. Par exemple, l’atrazine, interdit d’usage depuis 2003, est toujours détecté au côté de ses métabolites en 2021.

AH : Mais je le rappelle, pour clore ce chapitre sur une note plus optimiste : on observe une baisse des ventes des produits phytosanitaires les plus toxiques.

Les pesticides ne sont malheureusement pas les seuls polluants disséminés sur le territoire... On pourrait bien sûr parler des résidus plastiques, présents dans tous les milieux naturels...

Mais d’autres contaminants, moins connus du grand public, méritent toute notre attention : les PFAS, ou substances perfluorées.

Ces substances chimiques très persistantes appelées aussi polluants éternels sont utilisées dans de nombreux produits : des ustensiles de cuisine, des textiles... On les retrouve dans les eaux, les sols et les organismes. Elles sont la cause possible de perturbations endocriniennes et de certains cancers.

Sur la période 2019-2021, 40 % des analyses d’eau issues de rivières et lacs ont révélé la présence d’au moins un PFAS. Pour les eaux souterraines, ce taux avoisine 20 %.

Pour en savoir plus, je vous invite à consulter le rapport sur l’État de l’environnement en France...

Sandrine Parisse, chargée de mission agriculture et environnement au Commissariat Général du Développement Durable, merci d’être venue à ce micro !

AH : Merci Armel

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AH : Vous écoutiez Notre environnement monte le son ...

Dans le prochain épisode, nous parlerons d’une autre préoccupation environnementale : le réchauffement climatique et ses conséquences.

3. Climat : l’empreinte carbone c’est quoi ? Derrière nos consommations quotidiennes se cachent des émissions de gaz à effet de serre. 9,4 tonnes de gaz à effet de serre par an et par Français : ce podcast explique simplement de quoi se compose notre empreinte carbone et comment elle évolue.

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Armel Hemme (AH) : C’était il y a 10 ans déjà : la COP21 à Paris...

Comme beaucoup de citoyens j’avais été ému et soulagé, à la fin du marathon de négociations, d’entendre qu’un accord avait été trouvé (in extremis, après des prolongations) !

En décembre 2015 donc, 195 pays scellaient l’Accord de Paris, un accord international fixant une limite au réchauffement climatique mondial... Objectif : maintenir le réchauffement bien en-deçà des 2° C en 2100... Si possible, sous les 1,5° C.

Moins de 10 ans plus tard, la première barre est en train d’être franchie.

En 2024, la température moyenne mondiale a dépassé de 1,5 °C les niveaux préindustriels...
En France, on est déjà à + 1,9 degrés en moyenne sur la période 2013/2022 par rapport à la période 1900-1930.

Par ses émissions de GES, la France contribue au réchauffement climatique mondial... Mais quelle est l’empreinte carbone des Français exactement ? D’ailleurs, savez-vous ce qu’est précisément l’empreinte carbone, et comment elle est calculée ? C’est ce que nous allons voir dans cet épisode...

Bonjour, je m’appelle Armel Hemme

Vous écoutez Notre environnement monte le son , le troisième épisode d’une série spéciale enregistrée à l’occasion de la sortie du rapport sur l’État de l’environnement en France .

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L’État de l’environnement en France , c’est un rapport publié tous les 4 ans, depuis 30 ans. Il est produit par le Commissariat Général au Développement Durable (le CGDD pour les intimes).

Ce rapport périodique s’adresse à tout le monde, à vous, à moi, dans un souci de partage de la connaissance, de partage de l’information environnementale, pour nous guider dans nos prises de décisions individuelles et collectives...

Il explore quatre défis environnementaux interconnectés entre eux : l’épuisement des ressources naturelles, la pollution des milieux naturels, le changement climatique, et le déclin de la biodiversité.

Manuel Baude, bonjour !

Vous travaillez au Commissariat Général du Développement Durable, qui dépend du ministère de la transition écologique... Vous êtes chargé de mission pressions sur l’air et le climat.

QUESTION A – INTRO - Introduction sur les GES

Manuel Baude, quand on évoque les causes du réchauffement climatique, on parle souvent des « gaz à effet de serre », mais aussi du « CO2 » (le dioxyde de carbone), qui est l’un des GES... Alors il y en a combien, des GES ?

Manuel Baude (MB) : Il existe plusieurs substances gazeuses qui contribuent à l’effet de serre. Il faut rappeler que l’effet de serre un est un phénomène naturel qui s’amplifie en raison de molécules gazeuses émises par les activités humaines et envoyées dans l’atmosphère. Ces gaz sont de différentes natures.

On retrouve du CO2 - le dioxyde de carbone - qui provient majoritairement de la combustion d’énergie fossile. Cela représente 76 % des émissions nationales.
On comptabilise également le méthane - le CH4 - qui provient de l’élevage, du traitement des déchets et de l’extraction de produits fossiles. Le méthane c’est 15 % des émissions nationales.
Le protoxyde d’azote que l’on appelle N2O représente 7 % des émissions nationales de gaz à effet de serre. Il provient des engrais.
Enfin, les gaz fluorés, comme les HFC, les PFC, le SF6 ou le NF3 sont des gaz à effet de serre issus des systèmes de climatisation ou de divers procédés industriels. Ils contribuent à hauteur de 3 % des émissions nationales de gaz à effet de serre.

Le CO2 est le plus important des gaz à effet à effet de serre. Il représente trois quarts des émissions nationales. C’est pour ça qu’on parle plus souvent de CO2 que du méthane ou du protoxyde d’azote.

QUESTION B.1 – EMPREINTE - Concept

AH : J’aimerais qu’on s’arrête maintenant sur une expression qu’on entend souvent : l’empreinte carbone.

Comment définir simplement l’empreinte carbone ?

MB : L’empreinte carbone c’est une estimation des gaz à effet de serre qui sont associés à la consommation des habitants d’un pays.

Pour vous donner un exemple concret : quand un Français achète une voiture, on attribue à ce Français toutes les émissions de gaz à effet de serre qui ont été émises pour fabriquer et commercialiser cette voiture. Cette voiture contiendra par exemple des GES émis en France pour la fabrication des pneus mais aussi des GES émis en Allemagne pour la fabrication de l’acier.

Ce qu’il faut retenir c’est que l’empreinte carbone tient compte des émissions associées aux importations. Plus de la moitié des gaz à effet de serre de l’empreinte carbone de la France sont émises à l’étranger.

Selon nos dernières estimations, en 2023, l’empreinte carbone de la France représente 644 Mt équivalent CO2. Pour chaque Français, elle est en moyenne de 9,4 t CO2 éq.

AH : C’est beaucoup ?

MB : C’est beaucoup plus que la moyenne mondiale qui est de 6,6 t équivalent CO2 par personne. L’empreinte carbone moyenne d’un Français dépasse donc de 50 % la moyenne mondiale.

Il faut toutefois noter que l’empreinte carbone moyenne d’un Français est légèrement inférieure à la moyenne européenne qui est elle-même légèrement inférieure à l’empreinte carbone moyenne d’un Chinois.

L’empreinte carbone d’un Indien est estimée à 3 t et celle d’un Américain à 21 t. Cela signifie que l’impact sur le climat du mode de vie d’un Américain est 7 fois plus important que celui d’un Indien.

AH : Et cette empreinte de 9,4 t CO2éq par habitant repose essentiellement sur 6 grands postes de consommation... Les déplacements bien sûr, qui dépendent encore largement du pétrole - quels sont les autres ?

MB : On peut effectivement décomposer l’empreinte carbone en grands postes de consommation.
Vous avez cité les déplacements des ménages.
Il faut également distinguer l’alimentation qui inclut les émissions de l’agriculture, de l’industrie agro-alimentaire, des services de restauration et du transport des denrées.
Et il faut aussi citer l’habitat qui comprend les émissions issues de la construction et du chauffage des logements

Les déplacements, l’alimentation et l’habitat représentent près des trois quarts de l’empreinte carbone de la France.

Pour le reste, il s’agit des émissions associées aux services publics, aux services marchands et à l’achat de biens d’équipements (nos appareils électroniques et ménagers, nos vêtements, nos meubles…)

QUESTION B.2 – EMPREINTE - Évolution

AH : Si on regarde sur le temps long : l’empreinte carbone de la France a-t-elle tendance à s’alléger ?

MB : Oui. Depuis 1990 l’empreinte carbone a diminué de 13 %.

Dans le détail on observe deux grandes tendances :

  • On observe tout d’abord une baisse de 33 % des émissions qui proviennent des ménages et des entreprises localisées en France.
  • Mais on constate par ailleurs une hausse des émissions importées de 13 %.
    Pour être plus précis, on constate que l’empreinte carbone de la France a augmenté entre 1990 et 2008 et qu’elle diminue depuis de 2 % par an en moyenne.

QUESTION B.3 – EMPREINTE / INVENTAIRE - Objectifs

AH : En estimant l’empreinte carbone, on peut donc savoir si on se rapproche - ou non - des objectifs de réduction des GES ?

MB : Vous allez voir que ce n’est pas si simple...

Si vous parlez d’objectifs politiques climatiques, ceux-ci ne sont pas fixés sur l’empreinte carbone mais sur d’autres données : celles des inventaires nationaux de gaz à effet de serre.

AH : Les inventaires nationaux, une notion peu connue du grand public...
Pour comprendre : l’empreinte carbone de la France, c’est 644 mt CO2 éq. C’est beaucoup plus que l’inventaire national : 403 mt CO2 éq.
Deux chiffres différents pour un même pays : alors c’est quoi un inventaire national de gaz à effet de serre ?

MB : Pour comprendre ces différences de chiffres il faut bien avoir en tête que l’empreinte carbone et l’inventaire national sont deux notions bien différentes. Et elles ne portent pas sur le même périmètre.

L’empreinte carbone estime les émissions associées à la consommation alors que l’inventaire national de GES comptabilise uniquement les gaz à effet de serre émis sur le territoire français.

En tenant compte des émissions importées, l’empreinte carbone contient donc 60 % de gaz à effet de serre de plus que dans l’inventaire national. Cela signifie que la France importe plus de gaz à effet de serre qu’elle n’en exporte.

On parlait d’objectifs : pour la France c’est la neutralité carbone en 2050. Pour l’atteindre, il faudra que les émissions de l’inventaire national de gaz à effet de serre diminuent de 30 % d’ici 2030.

QUESTION C.1 – INVENTAIRE – comparaison internationale

AH : La France c’est moins de 1 % des émissions mondiales de CO2 : de ce point de vue, on peut se dire que c’est beaucoup moins que la Chine, (premier émetteur mondial avec 29 % des émissions), que les États-Unis (11 %) ou que l’Inde (7 %) !
Alors, est-ce qu’on fait mieux que les autres ?

MB : C’est surtout parce qu’on est moins nombreux !

Mais si on rapporte nos émissions de gaz à effet de serre au nombre d’habitant ou au PIB, la France est en dessous de la moyenne de l’UE. Ça s’explique par la décarbonation de notre production d’électricité.

QUESTION C.2 – INVENTAIRE – structure des émissions nationales : les transports

AH : Dans notre inventaire national, il y a bien sûr le secteur des transports - on l’évoquait à l’instant... Il compte parmi les gros émetteurs de GES en France...

MB : Oui, le secteur des transports est le premier contributeur aux émissions nationales de GES. Les transports sont à l’origine d’un tiers des émissions nationales en 2023. Les voitures particulières représentent environ la moitié des émissions des transports, les poids lourds environ un quart et les véhicules utilitaires légers 15 %.

En France, les émissions des transports ont augmenté depuis 1990. Mais dans les autres secteurs, ça baisse.

QUESTION D.1. – IMPACTS

AH : En France, les effets du changement climatique sont d’ores et déjà perceptibles :

  • hausse des températures,
  • fonte des glaciers,
  • augmentation des phénomènes météo extrêmes, des surfaces touchées par les sécheresses annuelles en France métropolitaine
  • hausse du niveau des mers...

... Avec, Manuel Baude, des conséquences très concrètes sur les activités humaines...

MB : D’abord sur la santé humaine ! La mortalité liée aux canicules et aux évènements climatiques extrêmes augmente.
Ensuite sur nos logements, ils sont menacés :

  • par la sécheresse qui provoque le phénomène de retrait gonflement des argiles : 10 millions de maisons individuelles (soit plus de la moitié des maisons), sont exposées à ce risque de dommages sur les structures des bâtiments,
  • par la hausse du niveau des mers qui menace les bâtiments et les infrastructures situés le long des littoraux.

Et il y a aussi des impacts sur les activités économiques :

  • Pour le tourisme en hiver : certaines stations de basse et moyenne montagne sont déjà contraintes de fermer.
  • Pour l’agriculture et notre alimentation, qui dépendent des milieux naturels qui sont perturbés et dégradés. Car le changement climatique modifie les écosystèmes naturels et le cycle de l’eau.

AH : Alors que les scientifiques prévoient un réchauffement planétaire de + 3 °C au niveau mondial (+ 4 °C pour le territoire français) d’ici la fin du siècle avec la poursuite des politiques mondiales existantes, ces bouleversements vont encore s’amplifier.

***

Tout ce que nous venons d’évoquer figure dans le rapport sur L’ État de l’environnement en France ... On y trouve beaucoup d’autres éléments, et notamment une enquête d’opinion sur Les Français et le climat, qui nous enseigne ceci :

Deux Français sur trois n’ont pas de doute sur le lien entre les activités humaines et le changement climatique. Autrement dit : pour une large majorité de la population, le changement climatique est une certitude scientifique ! Bonne nouvelle.

Autre bonne nouvelle, les médias font visiblement bien leur travail car 62 % des Français se sentent bien informés sur le sujet.

De même, une grande majorité de la population estime qu’il est de son devoir personnel d’essayer de lutter contre le changement climatique...

Mais ces résultats encourageants ne doivent pas masquer la persistance de signaux préoccupants dans l’opinion. Près d’une personne sur trois considère par exemple que le changement climatique reste « une hypothèse sur laquelle les scientifiques ne sont pas tous d’accord »...

Près d’un tiers des sondés se montre pessimiste et pense qu’il n’y a pas grand-chose à faire face au changement climatique et qu’il va falloir le subir.

Enfin, 28 % des Français pensent que le changement climatique n’aura pas de conséquences sur leur vie quotidienne à l’avenir.

... J’espère qu’une partie d’entre eux (au moins) écoutera notre podcast, ou lira le rapport !

Manuel Baude, chargé de mission pressions sur l’air et le climat au Commissariat Général du Développement Durable, merci d’être venu à ce micro !

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Vous écoutiez Notre environnement monte le son ...

Dans le prochain épisode, nous parlerons de la biodiversité, notamment dans les Outre mers où les récifs coralliens souffrent de la hausse des températures...

4. Biodiversité en Outre-mer, un trésor sous pression : La France détient la 4e plus grande surface de récifs coralliens au monde, qui héberge une biodiversité remarquable… Les coraux, les mangroves et les forêts tropicales sont menacés par le réchauffement des eaux, les pollutions, l’urbanisation et la déforestation.

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Si l’on vous demande où peut-on voir des récifs coralliens, vous allez peut-être penser à la grande barrière de corail, en Australie.

Mais savez-vous qu’il y en a dans les eaux françaises ?

Il y en a même beaucoup : la France détient la quatrième plus grande surface de récifs coralliens et de lagon au monde !

Elle détient aussi le deuxième espace maritime mondial après les États-Unis. Il s’étend sur plus de 10 millions de km² (plus de 20 fois la surface de la métropole), et 97 % se situent dans l’Outre-mer !

Cet espace maritime abrite une grande diversité d’espèces et de milieux.

Mais ces écosystèmes sont fragiles.

Dans ce nouvel épisode, nous allons parler de biodiversité, notamment dans les Outre-mer...

Et tenter de comprendre comment les activités humaines affectent les écosystèmes ultramarins.

Armel Hemme (AH) : Bonjour, je m’appelle Armel Hemme

Vous écoutez Notre environnement monte le son ... , le quatrième et dernier épisode d’une série spéciale enregistrée à l’occasion de la sortie du rapport sur l’ État de l’environnement en France .

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l’ État de l’environnement en France, c’est un rapport publié tous les 4 ans, depuis 30 ans. Il est produit par le Commissariat Général au Développement Durable.

La première édition, en 1994, suivait de peu le Sommet de la Terre de Rio de Janeiro, un moment majeur dans la prise en compte des questions liées à l’environnement au niveau mondial.

Ce rapport sur l’ État de l’environnement s’adresse à tous, dans un souci de partage de la connaissance, de partage de l’information environnementale, pour nous guider dans nos prises de décisions individuelles et collectives...
Il nous renseigne précisément sur quatre phénomènes en cours : l’épuisement des ressources naturelles, la pollution des milieux naturels, le changement climatique, et le déclin de la biodiversité.

Alexis Cerisier-Auger, bonjour !

Alexis Cerisier-Auger) : Bonjour Armel !

AH : Vous êtes chargé de mission biodiversité et milieux humides au Commissariat Général au Développement Durable...

J’évoquais les récifs coralliens, en introduction... On a tous déjà vu (sur un écran, à la télé, sur un ordi...) des images de coraux peuplés de poissons colorés - mais certains auditeurs se posent peut-être la question : le corail, c’est minéral, animal ou végétal ?

Alexis Cerisier-Auger : Alors ce n’est ni minéral ni végétal contrairement à ce que l’on pourrait penser. Le corail c’est un animal marin ou plus précisément un ensemble de petits animaux, les « polypes », qui vont se regrouper pour former un squelette calcaire que l’on appelle le corail.

AH : Les récifs coralliens abritent 25 % de la vie marine. Pourquoi est-ce qu’on y trouve un quart de la biodiversité marine ?

Alexis Cerisier-Auger : Les récifs coralliens abritent effectivement une biodiversité exceptionnelle !

D’après les derniers inventaires que l’on a réalisés, ce ne sont pas moins de 4 000 espèces de poissons et 800 espèces de coraux constructeurs qui dépendent de ces milieux.

Cette biodiversité, elle tire profit de nombreux bénéfices. Ces récifs vont jouer un rôle dans la protection de nombreuses espèces. Par exemple, en période de reproduction ou lors de la croissance des alevins.

Ce sont aussi de véritables garde-manger puisqu’ils vont permettre la production de nutriments. Ces récifs sont aussi interconnectés avec d’autres milieux comme les mangroves ou les herbiers marins. On va alors pouvoir observer des échanges entre ces milieux qui vont s’enrichir mutuellement.

Malheureusement, l’équilibre de ces écosystèmes est menacé, en grande partie par les activités humaines. Localement, ils peuvent être affectés par les aménagements côtiers, la plaisance, le transport maritime, l’agriculture, etc.

À l’échelle régionale ou mondiale, ils souffrent de l’augmentation de la température et de l’acidification des océans... Mais aussi d’autres pressions comme les événements météo extrêmes ou encore les espèces exotiques envahissantes, comme l’astérie, une étoile de mer.

AH : Qu’est-ce que cela produit comme effet sur les coraux ?

Alexis Cerisier-Auger) : On constate deux phénomènes principaux. L’un est très visible et est lié à la hausse de la température de l’eau. Le corail vivant va alors progressivement se décolorer et mourir. On appelle ça le blanchissement. On estime que 1 à 2 degrés de plus pendant 2 semaines peut suffire à blanchir massivement le corail. Le second phénomène, est lié à l’acidification des océans et va avoir un impact sur la croissance du corail en menaçant sa survie sur le long terme.


AH : Quel est l’état des récifs coralliens des eaux françaises ?

Alexis Cerisier-Auger : On constate des différences entre les territoires. En 2020, dans les îles du Pacifique et les îles Éparses de l’océan Indien, 70 % des récifs étaient en bon état alors que dans les Antilles françaises, à Mayotte et à la Réunion, 62 % étaient dans un état dégradé.

L’autre habitat côtier tropical par excellence qui concentre de nombreuses espèces et mérite toute notre attention c’est : les mangroves.

Les mangroves, ce sont des forêts amphibies très denses que l’on peut retrouver à la frontière entre le milieu terrestre et marin. Elles sont composées de palétuviers. Ce sont des arbres tropicaux dont les racines plongent dans l’eau. Cette eau peut être salée ou saumâtre, c’est-à-dire une eau douce et salée à la fois.

Ces écosystèmes couvrent 88 000 hectares dans 10 des 12 territoires d’outre-mer...

AH : Quels sont les superpouvoirs des mangroves ?

Alexis Cerisier-Auger : C’est un réservoir de biodiversité qui accueille de nombreuses espèces. Parmi ces espèces on va retrouver la mangouste, le raton crabier, ou encore, le petit crabe nageur.

Comme les récifs, ce sont des habitats où les espèces vont pouvoir se reproduire et où les petits vont être protégés des prédateurs. Indirectement, les mangroves protègent aussi les populations locales des cyclones et des tsunamis, et limitent l’érosion du littoral. Par exemple, dans la baie de Bouéni au sud de Mayotte, une mangrove de plus de 200 ha a permis de protéger du cyclone Chido les villages et les embarcations. On voit ici très concrètement le rôle important qu’ont les mangroves mais ce n’est pas tout.

Elles ont aussi un rôle dans le stockage :

  • stockage des sédiments qui proviennent du territoire et sont déversés dans les eaux, ce qui permet une eau plus pure, plus limpide.
  • Mais aussi, stockage du carbone, en grande quantité qui fait des mangroves, l’ensemble forestier qui capte le plus de CO2.

AH : Comment évoluent ces mangroves dans les eaux françaises ? Il y a du positif et du négatif je crois...

Alexis Cerisier-Auger : Là encore, on peut observer une situation très contrastée entre les territoires. Les mangroves de Saint-Martin ont connu une perte de leur surface de 40 %, celles de Saint-Barthélemy de 65 %. Et pourtant, en Guadeloupe, elles ont progressé de 19 % depuis 1950.

AH : Par quoi sont-elles menacées ?

Alexis Cerisier-Auger : Sur le littoral, l’empreinte de l’homme est partout. On aménage le territoire en construisant des canalisations, en déviant les cours d’eau et en artificialisant les sols par l’urbanisation notamment.
Il y a aussi les pollutions, qui affluent de certains bassins-versants vers les rivières puis vers la mer, et affectent les mangroves. La menace est donc multiple et elle favorise la fragmentation et la dégradation de ce milieu.

Les forêts maintenant...
Quand on parle de déforestation, on pense souvent du Brésil... En Guyane, territoire voisin, la forêt est vaste - environ 8 millions d’hectares, soit un tiers de la forêt française ! Est-elle préservée ? C’est ce que je croyais...

AH : En réalité, là aussi la forêt recule (dans des proportions beaucoup plus modestes qu’au Brésil heureusement)... Pourquoi ce recul ?

Alexis Cerisier-Auger : Plusieurs facteurs comme l’accroissement démographique et le développement des activités minières - qu’elles soient légales ou illégales - sont responsables de ce recul. Les forêts sont « grignotées » au profit de zones minières, agricoles ou urbanisées.

Les conséquences, elles sont multiples :

  • Sur les habitats et les espèces qui disparaissent
  • Sur l’eau aussi qui va être polluée et donc plus difficile à traiter
  • Et sur les populations locales où l’on va voir apparaître des problèmes sanitaires liés à leurs habitudes alimentaires. Par exemple, en Guyane, on a des populations amérindiennes qui subissent des contaminations en consommant des poissons pollués au mercure lié à l’extraction illégale de l’or.

AH : Dans le rapport on lit qu’entre 1990 et 2020, la superficie forestière guyanaise a diminué de 1,5 %.
1,5 % en 30 ans, les dommages semblent limités...

Alexis Cerisier-Auger : Oui, c’est ce que l’on pourrait penser au premier abord mais la destruction de la forêt peut avoir des effets en cascade sur les espèces notamment sur les plus vulnérables. Il a été démontré récemment sur le plateau des Guyanes qu’une perte de moins de 11 % de forêt pouvait conduire à un déclin de plus du quart des poissons et des mammifères du territoire.

Et toutes ces données sont à retrouver dans le rapport sur l’ État de l’environnement .

***

On a parlé d’écosystèmes spécifiques aux outre-mer, avec vous Alexis, mais la question de la biodiversité se pose dans les mêmes termes pour bien d’autres écosystèmes...

A ce jour, 2 millions d’espèces ont été inventoriées sur Terre. 10 % des espèces décrites dans le monde sont présentes en France - soit un peu plus de 200.000...

On l’a compris, la France en tant que carrefour biogéographique concentre un patrimoine naturel d’une exceptionnelle diversité mais qui subit de multiples pressions : destruction des milieux naturels, surexploitation des ressources, changement climatique, pollution, espèces exotiques envahissantes.
Aujourd’hui, la France est au 10e rang des pays hébergeant le plus grand nombre d’espèces menacées. Elle a donc de grandes responsabilités dans la protection.

Pour tenter d’inverser la tendance et de préserver ses écosystèmes, la France a déjà pris des mesures, il faut le souligner... On peut citer la Stratégie nationale pour les aires protégées : qui fixe des objectifs de protection à l’horizon 2030, notamment de protéger 30 % du territoire national, dont 10 % en protection forte comme les parcs nationaux ou encore les réserves.

La France a dépassé le premier objectif : 33 % du territoire national est couvert par une aire protégée...

Le citoyen est également largement impliqué dans cette démarche lors des campagnes de sensibilisation et de communication.

AH : Alexis Cerisier-Auger, chargé de biodiversité et milieux humides au Commissariat Général au Développement Durable... Merci d’être venu à ce micro !

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C’était le dernier épisode d’une série spéciale consacrée au Rapport sur l’ État de l’environnement en France .. Vous pouvez consulter ce rapport, très accessible, sur Notre environnement.

Vous écoutiez Notre environnement monte le son ... ! Disponible sur toutes les plateformes de podcast.

Pour aller plus loin sur ces défis, en synthèse, en infographies et en vidéos, consultez la rubrique dédiée au rapport « État de l’environnement en France (REE 2024) »

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