Perturbateurs endocriniens : BPA et DEHP
Mis à jour le | Commissariat général au développement durable
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Les perturbateurs endocriniens, des substances chimiques préoccupantes encore faiblement encadrées
Le système endocrinien comprend les organes sécrétant des hormones. L’OMS définit un perturbateur endocrinien (PE) comme « une substance exogène ou un mélange qui altère la/les fonction(s) du système endocrinien et, par voie de conséquence, cause un effet délétère sur la santé d’un individu, sa descendance ou des sous-populations ». Hormones naturelles ou de synthèse, produits chimiques ou sous-produits industriels, les PE sont d’une grande diversité. L’étude de leurs effets est confrontée à plusieurs difficultés : doses d’exposition à ces substances, délai d’apparition des effets délétères, existence de périodes de vulnérabilité des populations face au risque toxique (période prénatale, avant/après la puberté, effet transgénérationnel), effet cocktail, etc.
Par ailleurs, le défaut de réglementation spécifique applicable aux PE, en raison de l’absence d’une définition commune à l’ensemble des PE, rend difficile leur régulation. En 2017, une définition réglementaire européenne a été adoptée pour les PE utilisés comme principes actifs biocides (règlement délégué 2017/2100 du 4 septembre 2017). En 2018, les PE utilisés comme pesticides ont, à leur tour, fait l’objet d’une définition européenne (règlement 2018/605 de la Commission européenne du 19 avril 2018), mais celle-ci n’est, pour le moment, pas intégrée au sein du règlement européen REACH (règlement CE 1907/2006 du 18/12/06 concernant l’enregistrement, l’évaluation et l’autorisation des substances chimiques).
Le BPA et le DEHP, des PE de la vie quotidienne sous surveillance
Le bisphénol A (BPA) et le DEHP (phtalate de di-2-éthylhexyle) sont utilisés depuis cinquante ans pour la fabrication de certains plastiques et de résines. Ils entrent dans la composition de nombreux produits de consommation courante, tels que les emballages alimentaires plastiques, les équipements domestiques et automobiles, les jouets et articles de puériculture ainsi que les équipements médicaux. Le BPA peut aussi être présent dans les produits de consommation en polycarbonate, les emballages avec un film protecteur (revêtements intérieurs de boîtes de conserve, canettes) et les papiers (tickets de caisse).
Le DEHP entre dans la composition de certains produits d’entretien ménager, de peintures, de films, de tissus ou encore de papiers enduits. Ces deux substances sont considérées comme des PE, notamment par le PNUE et l’OMS depuis 2012. Elles sont également identifiées comme extrêmement préoccupantes pour la santé humaine et classées comme PE pour la santé humaine au titre du règlement Reach en 2017. En outre, le DEHP est classé comme substance cancérigène possible (groupe 2B) par le Circ et comme substance toxique pour la reproduction (groupe 1B) dans le cadre du règlement européen 1272/2008, relatif à la classification, à l’étiquetage et à l’emballage des substances et des mélanges.
La période d’exposition prénatale au BPA et au DEHP apparaît comme particulièrement critique car elle est susceptible d’altérer le développement du fœtus et d’entraîner des effets précoces pouvant avoir des conséquences pathologiques à l’âge adulte (effet DOHaD).
Le BPA fera, à compter de 2020, l’objet d’une utilisation restreinte dans le papier thermique (utilisé notamment pour les tickets de caisse) au sein de l’Union européenne suite à l’adoption du règlement européen CE 2016/2235 du 12 décembre 2016. En guise de substitution, des industriels ont désormais recours au bisphénol S (BPS). Dans un rapport de 2013, l’ANSES a relevé que l’activité oestrogénique de ce composé, commune à la famille des bisphénols, pourrait également s’avérer néfaste pour le consommateur et a appelé à porter une attention particulière quant à son utilisation. Plus largement, l’agence souligne l’absence de données toxicologiques suffisantes pour évaluer la toxicité des autres substituts au BPA.
Une contamination des milieux aquatiques
Le risque sanitaire ou environnemental lié à la présence de ces substances dans les milieux naturels est difficile à estimer en l’absence de valeurs de référence de toxicité liées à la perturbation endocrinienne.
En France, le BPA et le DEHP entrent dans le panel des substances chimiques recherchées dans le cadre de la surveillance de la qualité des eaux souterraines et superficielles. Si un suivi est effectué sur une large part du territoire depuis une dizaine d’années, celui-ci n’est toutefois pas systématique. Cependant, lorsqu’elles sont recherchées, ces deux substances sont régulièrement détectées, en particulier dans les eaux superficielles.
Ainsi, pour les cours d’eau et les lacs, le DEHP présente une concentration supérieure à 1 nanomole/litre (nmol/l) dans plus de la moitié des mesures effectuées. C’est également le cas du BPA, qui est quantifié dans plus du tiers des mesures effectuées.