Économie

Productivité matières et facteurs d’évolution du besoin de l’économie

Mis à jour le | Commissariat général au développement durable

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La productivité matières, ratio rapportant le Produit Intérieur Brut (la création de richesse) à la consommation intérieure de matières, permet de mesurer la transition vers un système économique plus économe en ressources naturelles. Le besoin en matières de l’économie dépend de facteurs d’ordre à la fois démographique (la taille de la population), économique (son niveau de vie, mesuré donc par le PIB) et technique (le progrès technologique et la structure de l’économie).

Une productivité matières en croissance

En France, avec une consommation moins vigoureuse que le PIB, la tendance actuelle est une poursuite de la progression de la productivité matières, la croissance du PIB s’accompagnant d’une réduction de la consommation intérieure apparente de matières. En 2018, avec la baisse de cette consommation de matières (DMC), la productivité gagne 3 %, atteignant presque 3 €/kg.

Une consommation plus sobre depuis la crise de 2008

La France a pour objectif de découpler progressivement la croissance de sa consommation de matières premières. Dans le même temps, elle vise à une diminution de sa consommation intérieure de matières par habitant (article 74 de la Loi de transition énergétique pour la croissance verte). À cet effet, elle se fixe comme objectif une hausse de 30 %, de 2010 à 2030, du rapport entre son produit intérieur brut et sa consommation intérieure de matières, la « productivité matières ». La cible 2030 (à + 30 %) correspond à 3,42 €/kg, la productivité matières s’élevant en 2018 à 2,96 €/kg (soit + 12 % par rapport à 2010).

La productivité matières est un indicateur faisant partie des cibles relatives aux ODD 2030 définies par l’ONU.

Illustration 2616
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Notes : * la consommation intérieure apparente de matières agrège, en tonnes, les combustibles fossiles, les produits minéraux et agricoles, extraits du territoire national (métropole et DOM) ou importés sous forme de matières premières ou de produits finis, moins les exportations ; ** en volume, prix chaînés base 2014.

Un découplage progressif entre consommation de matières et croissance économique

Suite à la récession de 2008, ayant eu pour effet notamment une contraction de l’activité du secteur de la construction, le moindre recours aux matériaux non métalliques (pesant pour la moitié de la consommation intérieure de matières, la DMC a intensifié la hausse de la productivité matières.

Cette dernière atteint 2,96 €/kg en 2018 (contre 2,28 €/kg en 2007, avant la crise), traduisant un moindre besoin en matières pour produire une même quantité de richesse (valeur ajoutée). C’est le signe d’un découplage progressif entre la consommation de matières et la croissance économique.

Ainsi, générer 1 € de richesse supplémentaire nécessitait 380 grammes de matières en 2010, alors qu’en 2018 il n’en faut plus que 338. Ce découplage est cependant à relativiser, de par l’importance disproportionnée du poids des matériaux de construction, dont l’évolution particulière conditionne l’ensemble.

Cependant, la consommation intérieure apparente de matières ne rend compte qu’imparfaitement de la pression environnementale induite par le comportement des consommateurs. En effet, la DMC ne comptabilise que partiellement les matières mobilisées pour la fabrication des produits importés et exportés. Afin de compléter cette approche, l’évolution de l’Empreinte matières (consommation en équivalent matières premières, RMC, pour Raw Material Consumption) permet de s’affranchir du biais de la DMC, en intégrant les ressources mobilisées indirectement hors de nos frontières pour produire et transporter les produits importés. En 2018, l’empreinte matières s’élève à 13,9 tonnes par habitant (11,6 t/hab pour la DMC).

Les tendances restent cependant les mêmes que pour la DMC au regard de l’évolution du PIB.

Les facteurs influant le besoin en matières de l’économie

Le besoin en matières de l’économie française (DMI, Direct Material Input) comptabilise l’extraction intérieure et les importations, soit l’ensemble des matières entrant physiquement dans l’économie. L’évolution de ce besoin en matières dépend de facteurs d’ordre à la fois démographique, économique et technique.

Un besoin en matières moindre depuis la récession de 2008

Le facteur démographique étant pris en compte ici par la taille de la population, le niveau de vie est estimé au travers du PIB (par habitant). Enfin, la quantité de matière mobilisée rapportée au produit intérieur brut (DMI/PIB) retrace les effets cumulés du progrès technique et de l’évolution de la répartition de la valeur ajoutée entre les différentes branches.

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Note : l’effet de chacun des facteurs est estimé toutes choses égales par ailleurs.

En 2018, le besoin exprimé par l’économie française est très légèrement moindre que son niveau d’il y a 28 ans. Au total, le besoin en matières effectivement calculé (DMI = extraction intérieure + imports) est de 1,8 % inférieur à son niveau de 1990, alors que jusqu’à la récession de 2008 il avait cru de 11 %.

Des évolutions différenciées selon les facteurs

Différents facteurs explicatifs s’opposent. Ainsi, l’évolution du niveau de l’activité économique, considéré individuellement et toutes choses égales par ailleurs, aurait entraîné une progression de plus d’un tiers du besoin en matières. De même, le seul effet démographique aurait conduit à une hausse de 15 %. A contrario, l’effet cumulé du progrès technique et de la composition de la production (part relative des activités agricoles, industrielles et de services) aurait permis, seul, une baisse du besoin en matières de 64 %.

L’évolution technique et l’évolution de la répartition de la valeur ajoutée entre les différentes branches ont contribué à diminuer l’intensité matière de l’économie française, c’est-à-dire la masse de matières mobilisées pour générer chaque unité de PIB. Entre 1990 et 2008, le seul effet résultant de ces deux évolutions aurait entraîné, toutes choses égales par ailleurs, une diminution du besoin d’environ un quart. Depuis lors, la contraction de l’activité économique liée à la crise, en particulier dans le secteur de la construction, a amplifié la diminution du besoin en matières (- 19 % sur 2009-2018), ce qui résulte sur l’ensemble de la période en une réduction du besoin d’environ un tiers.

Au cours de la période 1990-2018, l’importance relative en termes de valeur ajoutée de certaines activités industrielles grosses consommatrices de matières (comme la production et la transformation des métaux, ou encore la construction) a reculé au profit d’activités de services, moins consommatrices de matières, du moins directement (la baisse d’activités sur le territoire national peut en effet se traduire par une augmentation de flux indirects à l’étranger).

Concernant la composante technique, l’activité de construction est la première contributrice à la baisse de l’intensité matérielle de l’économie, étant donné l’importance des matériaux de construction dans la masse totale de matières mobilisées (environ la moitié de la DMC). Les modifications intervenues dans les conditions de production d’électricité (remplacement du charbon ou du pétrole par le gaz) ont, dans une moindre mesure, également joué dans le sens de la croissance de la productivité matières au cours de cette période. L’accroissement de l’utilisation de matières premières secondaires issues du recyclage, notamment pour la production des métaux, des papiers-cartons et du verre, y a également contribué.
Les effets de la baisse de l’intensité matérielle de l’économie française ont été compensés par l’augmentation du niveau de vie. Au cours de la période 1990-2018, la seule progression du PIB par habitant aurait provoqué, toutes choses égales par ailleurs, une progression de plus d’un tiers du besoin en matières.

Par ailleurs, sur la base de la seule croissance de la population, le besoin en matières se serait accru de 15 % entre 1990 et 2018.

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